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Une enquête policière Old School dans un contexte futuriste​


De Brian K. Vaughan et Martin Marcos Ed urban Comics, 2017

« Nous sauvons les apparences en société, mais lorsque nous sommes seuls (…) nous nous dévoilons comme les êtres pathétiques que nous sommes ».

Le Cloud détenait toutes les informations de l'humanité, de la plus banale à la plus secrète. Il y a plusieurs décennies de cela, le système a bogué (de façon intentionnelle ou pas, personne ne sait) & ce flot de renseignements s'est déversé, comme lors d'un déluge, exposant aux yeux de tous ce que chacun dissimulait de soi. Puis le Nuage a implosé. Internet, la wifi, les portables, tout ça n'existe plus depuis. La Teevee, en revanche, est présente dans tous les foyers. Hors du cadre de la vie privée, passé l'adolescence, chacun désormais cache son identité, son visage, sous des nymes (masques-hologrammes & déguisements criards) pour passer inaperçu.

Une enquête policière Old School dans un contexte futuriste.

Le correspondant adjoint Strunk prend en flagrant délit (& visiblement sur délation) un homme qu'il soupçonne d'abord d'être un pervers, occupé qu'il le surprend à photographier, d'une terrasse, une femme se déshabillant dans l'immeuble d'en face. L'homme s'enfuit aussitôt. Il se jette dans le vide, atterrit sur un plan incliné, se laisse glisser à toute vitesse jusqu'au bord, puis profitant de son élan, s'agrippe à un réverbère, saute sur le toit d'un train, puis du train au bras d'une grue & de cette grue au toit d'un nouvel immeuble. Cela sans que, la nuit aidant, le correspondant adjoint ne puisse rien identifier de lui, sinon, qu'il est probablement métis & sans doute paparazzi (journaliste sans licence). Car jusqu'ici, Strunk l'a poursuivi. Mais jusqu'ici seulement. Le temps qu'il effectue lui aussi galipettes & cabrioles, l'inconnu s'est rendu plus anonyme encore, devenant invisible dans la foule grouillante, colorée & singulière d'une artère fort animée de la ville de Los Angeles.

Nous retrouvons notre inconnu plus tard, dans un jardin public, assis sur un banc, en compagnie d'un homme (à l'identité dissimulée derrière un nyme de poisson), auquel il remet une enveloppe contenant les photos prises plus tôt dans les circonstances que l'on sait. On apprend ici que ses initiales sont P.I., pour « Private Investigator ».

Puis dans un bureau, un peu plus tard encore, lorsqu'un personnage (préservant, lui, son anonymat sous l'apparence d'une tête de tigre) lui demande, moyennant rétribution, d'accepter une enquête. On apprend là que P.I. signifie aussi Patrick Immelmann (mot de passe qui cache son véritable nom, car lui ne porte pas de masque, mais une onifripe, veste à la capuche camouflage).

De brusques événements (que nous ne dévoilerons pas) survenant peu après vont contraindre P.I. à accepter cette enquête...

The Private Eye fait (donc) le récit d'une enquête policière menée « à l'ancienne », sur toile de fond & thèmes futuristes. Pour faire évoluer l'investigation dans laquelle il s'est vu embringué, collecter les informations dont il a besoin, P.I. va procéder comme n'importe quel détective privé (sauf que l'onifripe a remplacé l'imper de Bogart) ; l'environnement, les situations, les moyens dont il dispose, sont ceux d'un futur assez proche du notre. On peut remarquer de loin en loin quelques références à des classiques (comme une affiche du Faucon Maltais dans le bureau de P.I.) & des clins d'œil à des auteurs précurseurs, ou à des artistes renommés. Il y a un côté « Big Brother », une ambiance sous-jacente de contrôle sur l'intimité de l'individu, d’omniprésence de la Teevee (ici longtemps après la chute d'internet),de connivence entre la presse & la police, de la façon dont elles se partagent le (quatrième) pouvoir. The Private Eyes est également une réussite visuelle. Le trio découpage / cadrages / réalisation envoie du lourd. Les masques & costumes sont magnifiques, loufoques, hallucinants, parfois comme sortis tout droit d'un Carnaval de Venise sous acides. Un traité très esthétique, souvent très beau.


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