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Paranoïaque, borderline, & pourtant infaillible


De Sean Murphy. Ed. Urban Comics, 2018.

Batman & le Joker, de nouveau opposés dans un sempiternel affrontement, sous un angle inattendu & un traité tellement dark que le blanc semble immaculé...

L'intro ouvre sur une pleine page : paysage de nuit/chauves-souris/vue d'ensemble sur le gigantesque manoir d'Arkham. Dans un vrombissement, la Batmobile passe le portail de l'asile. Le visiteur est accueilli par la sécurité, puis, dans l'ombre, escorté jusqu'à une cellule sise dans les sombres dédales étroitement surveillés de l'hôpital psychiatrique. Dans cette dite cellule, Batman est enchaîné. C'est Jack Napier - le Joker – sans mascara ni artifices, qui visite le prisonnier, & non l’inverse, comme de tout temps ce fût le cas...

Rédemption en (noir &) blanc

Les psychiatres de Gotham le disent depuis longtemps & s'accordent sur le sujet : le chevalier noir est tout aussi frappadingue - & dangereux pour la société ! que les sociopathes qu'il traque. Au cours d'un affrontement qu'ils se livrent dans les rues de la mégapole - & qui, en soit, constitue un classique dans l'histoire du justicier & de son ennemi attitré - Batman fait avaler au Joker un tube entier de pilules censées agir sur ses troubles mentaux. De fait, à mesure que Batman sombre visiblement plus encore dans la noirceur & la violence, le Joker, suite à ce traitement médicamenteux radical, a changé du tout au tout, au point d'apparaître aux yeux des médecins & des citoyens comme un chevalier blanc, & de présenter sa candidature à la mairie de Gotham City.

Les rôles se sont-ils réellement inversés, ou s'agit-il encore une fois d'un plan machiavélique ayant germé dans le cerveau disjoncté du Joker afin de régner sur Gotham...?

Paranoïaque, borderline, & pourtant infaillible.

Batman est devenu un personnage sombre, tourmenté & violent au milieu des années 1980, lorsque Frank Miller l'a dépoussiéré & réhabilité avec son Dark Knight ; à partir de là, exit le Batman Détective de mon enfance (avec sa petite loupe & son colt .45 à la ceinture). Sean Murphy s'inscrit ici dans la lignée de cet état de fait : dans son récit, sous ses traits obscurs & torturés, notre héros en devient même inquiétant, parano, incontrôlable. C'est pourtant encore & toujours lui, transcendé par l'adversité & l'abnégation, qui sauvera une fois de plus Gotham du chaos...comme tout bon justicier qui se respecte !


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